Àngels Chacón: « Toute solution en Catalogne passera par un large pacte de consensus, la voie unilatérale ne fonctionne pas »

Le dirigeant du Centrem et ancien ministre de la Generalitat considère que le processus d’indépendance est terminé

Anges Chacon
Anges ChaconPhoto : Gorka Loinaz / Araba Press

L’ancien ministre de la Generalitat Anges Chacon est devenu l’un des espoirs des milieux d’affaires catalans pour retrouver le « nationalisme pragmatique » de l’ancien Convergence de Jordi Pujol. A la tête du Centrem, parti composé d’anciens dirigeants du PDECAT, la lumièreIl y a d’autres formations de centre-droit, préparant les candidatures aux municipales de 2023, première grande revalidation dans les urnes d’une formation à vocation d’entrer dans la Parlement et Congrès.

Qu’est-ce que Centerm et avec quels objectifs est-il né ?
Un nouveau parti centriste catalan qui veut donner la priorité à la promotion du dialogue et du consensus. On se retrouve avec une Catalogne où il y a un basculement vers la gauche populiste du gouvernement de la Generalitat formé par ERC et JxCat et à l’autre extrême, des partis de droite comme Vox qui cherchent la confrontation. Par conséquent, nous voulons occuper un espace d’intersection où peuvent entrer des personnes ayant des positions différentes dans le débat Catalogne-Espagne mais qui s’engagent à accroître la prospérité de la Catalogne. Nous sommes définitivement une fête post procés.
N’est-il pas risqué d’envisager la procédure terminée ? Les mêmes qui ont mené le putsch de 2017, Carles Puigdemont et Oriol Junqueras, continuent de commander JxCat et ERC…
Il y a des histoires de procès qui cherchent à durer dans le temps, mais, si nous sommes réalistes, les Catalans ne peuvent plus être dupes. Nous n’allons pas dire que le problème catalan est déjà résolu, mais ce n’est pas non plus que la meilleure option est la confrontation avec l’État. Par conséquent, ni les thèses de ceux qui ignorent tout ce qui s’est passé en Catalogne au cours de la dernière décennie, ni ceux qui veulent prolonger la confrontation de quelque manière que ce soit. Nous devons créer des espaces de rencontre.
Que signifie fondamentalement être tolérant envers ceux qui enfreignent la loi ?
Non. Il faut avoir le courage de dire les choses par leur nom et le courage de retourner en politique ce qui n’aurait jamais dû quitter le champ politique. Nous devons aborder le problème catalan par le dialogue et la nécessité de trouver un consensus. La voie unilatérale ne sera pas la solution. De même, il est nécessaire d’aborder les problèmes structurels de la relation entre la Catalogne et l’Espagne qui sont politiques, mais aussi économiques.
Quelle est votre proposition politique : un nouveau statut d’autonomie, un référendum concerté, la voie fédérale… ?
Dans notre parti, il y a des personnes avec des sensibilités différentes à cet égard, mais nous comprenons tous que la Catalogne est une nation et un sujet politique qui a le droit et le devoir d’améliorer son autonomie. Sans limites : d’une amélioration du financement au maximum, un référendum d’indépendance convenu avec le gouvernement central. Bien sûr, il doit s’agir d’une solution convenue avec un large consensus, légale et votée. Il ne nous sert à rien d’aller à un référendum d’indépendance qui gagne ou perd avec une minorité, puisque rien ne le résoudra. Un large consensus est nécessaire. La confrontation avec l’État n’a pas servi, la passivité et la création d’une histoire anti-catalaniste n’ont pas servi non plus. Toute solution pour la Catalogne, qui est une société très complexe et plurielle, doit être approuvée par une large majorité.
Pour Centrem, l’application de la loi va-t-elle à l’encontre de la Catalogne ?
Non. Je fais référence à la passivité totale du gouvernement espagnol depuis le début de la crise du Statut, comme si les Catalans n’étaient pas un sujet politique. Cela a alimenté la désaffection. Ensuite, nous avons vu comment, avec les égouts de l’État, on a tenté de salir la réputation des partis et des dirigeants catalans, au lieu de s’asseoir à une table et d’aborder les problèmes politiquement. Ce qui ne devait pas être soumis à la justice était poursuivi. Je ne dis pas que l’Espagne ou Madrid vont contre la Catalogne, mais certaines personnes de certains gouvernements ont élaboré des stratégies pour nuire à la Catalogne. La loyauté qui nous est demandée, à nous catalans, doit également se manifester de la part des institutions de l’État.
Pensez-vous que l’ERC et les JxCats ont réfléchi à leur déloyauté en 2017 et à la méfiance envers la Catalogne que leurs actions suscitent dans le reste de l’Espagne ?
Sûrement qu’ils l’ont fait, car ils ont modulé leurs discours.
N’est-ce pas parce qu’ils se sont heurtés au mur de la justice ?
Pour peu que ce soit, mais le fait est que les discours ont été modélisés. C’est pourquoi je dis que nous nous traitons comme des adultes et par loyauté. C’est pourquoi l’État ne peut pas ignorer les revendications catalanes d’une plus grande autonomie ou d’un meilleur financement, car sinon nous créerons à nouveau le terreau de la réapparition de la confrontation de 2017. Fuyons les monologues
Que faire de Puigdemont ?
Je crois que le pardon préalable est une solution juridique viable. On ne peut pas être ancré dans l’idée de vengeance, car cela revient à ne pas comprendre que Puigdemont représentait des millions de Catalans.
A la table de négociation promue par Sánchez, il n’y a que cet ERC, il ne semble pas qu’il inclue la pluralité politique qui existe en Catalogne…
La grâce préalable est une solution juridique viable. On ne peut pas être ancré dans l’idée de vengeance, car cela revient à ne pas comprendre que Puigdemont représentait des millions de Catalans.
A la table de négociation promue par Sánchez, il n’y a que cet ERC, il ne semble pas qu’il inclue la pluralité politique qui existe en Catalogne…
De toute évidence, le président de la Catalogne a le droit de parler et d’être d’accord avec Madrid, mais une autre chose est que ce gouvernement a la volonté d’écouter au moins le reste des partis politiques catalans. Vous ne pouvez pas être inconscient de ce qui se passe autour de vous. Un geste en ce sens de Pere Aragonès ne serait pas mauvais pour montrer sa volonté d’être le président de tous les Catalans.
Qu’est-ce qui différencie le Centerm du PDECAT, le parti dont vous êtes issu et qui a été l’héritier de Convèrgencia ?
Nous ne sommes pas un parti indépendantiste, nous avons des militants qui sont, comme d’autres sont des autonomistes, des fédéralistes… En cela, nous ressemblons davantage à l’ancienne Convergència. Nous voulons défendre les intérêts de la Catalogne, également au Congrès comme le fait le PNV avec ceux du Pays basque, mais en même temps aider à la gouvernabilité de l’Espagne.
Ce sont donc des nationalistes.
Dans nos statuts, il est dit que la Catalogne est une nation, appelez-la comme vous voulez. Nous avons été tellement prisonniers des noms que nous ne nous sommes pas souciés du contenu. Au-delà des noms, nous avons l’amélioration de la Catalogne dans notre axe central. Il est urgent de sortir du blocus politique, social et économique.
Pensez-vous que l’espagnol devrait être considéré comme la langue véhiculaire dans les écoles catalanes ou défendez-vous le maintien du modèle d’immersion ?
Nous défendons qu’à la fin de leur période scolaire les élèves sortent maîtrisés en catalan, espagnol et une langue étrangère. Il est normal que la même règle ne puisse pas être appliquée dans toutes les écoles de Catalogne, dans certaines il faudra renforcer l’enseignement en espagnol et dans d’autres l’enseignement en catalan. Nous ne ferons pas de la langue un problème nucléaire.
Quelle est votre proposition financière ? Un pacte fiscal comme celui que Mas a proposé à Rajoy en 2012 ?
Un nouveau modèle de financement est urgent et la Catalogne dispose de plus de ressources. Avec un concert catalan comme celui des Basques ? Pourquoi pas. Cela, sans cesser d’être solidaires de l’Etat. À cela, il faut ajouter une politique économique de la Generalitat qui réduit la pression fiscale sur les familles, les indépendants et les PME, en éliminant les droits de succession, entre autres impôts.
Il a été publié que l’ancien président du Barça, Sandro Rosell, s’était vu proposer de se présenter conjointement à la mairie de Barcelone.
L’important est de présenter un projet avec une idéologie et un projet, pas seulement issu de l’anti-coaluisme. La façon dont vous gérez une ville est idéologique. Nous ne soutiendrons pas un projet qui va à l’encontre des partis politiques, car une expérience en gestion publique est nécessaire pour diriger Barcelone.