Bruxelles accuse une nouvelle fois le blocus dans le renouvellement du CGPJ et regrette la « vulnérabilité due à la politisation »

La Commission européenne publie son deuxième rapport sur l’État de droit et regrette le peu de progrès réalisés par l’Espagne sur les questions les plus préoccupantes au cours de l’année dernière

Dolores Delgado, procureur général de l'État, dans l'hommage à la v
Dolores Delgado, procureure générale de l’État, en l’honneur des victimes de la pandémie la semaine dernière.Chema MoyaEFE
  • UE Bruxelles considère avec inquiétude les relations entre le gouvernement et le procureur général de l’Etat
  • Entrevue Le commissaire européen à la Justice : « Le retrait de la réforme CGPJ est une bonne nouvelle, mais ce n’est pas suffisant »

Le blocus dans le renouvellement de la CGPJ. Les liens entre le procureur général et le gouvernement. Le manque de moyens et de magistrats. Le sentiment de politisation. Que la justice espagnole ait de sérieux problèmes n’est pas un mystère, et qu’à Bruxelles ils en sont parfaitement conscients non plus. La situation dans notre pays n’est pas la pire et il n’y a pas d’inquiétude marquée chez ses partenaires ou institutions, mais au cours des 10 derniers mois la situation, loin de s’améliorer, a stagné ou même empiré. C’est la leçon qui est tirée du Deuxième rapport sur l’État de droit publié ce mardi par la Commission européenne et qui passe en revue, un à un, tous les partenaires communautaires.

« Le système judiciaire espagnol continue de faire face à certains défis. En particulier, le manque de renouvellement du Conseil général de la magistrature, qui persiste en l’absence d’un accord au Parlement pour renouveler divers organes constitutionnels », indique le document, répétant presque mot pour mot la langue de septembre dernier. Il y a cependant une nouveauté : « une évolution positive a été le retrait d’une proposition de réforme du système de sélection de ses juges-membres, ce qui aurait accru la perception du Conseil comme vulnérable à la politisation. Dans ce contexte, un appel a été lancé pour établir un système d’élection des membres du Conseil par leurs pairs conformément aux normes européennes. Il est important que les normes européennes soient prises en compte et que toutes les parties prenantes concernées soient consultées », indique le rapport.

Lire ainsi peut paraître aseptisé, comme si tout s’était passé sans contexte, mais l’appel à écouter toutes les parties, à suivre les recommandations des instances et instances européennes (UE ou non, comme la Commission de Venise) et surtout, le la pression pour retirer cette proposition législative de réforme du CGPJ vient précisément de Bruxelles, de la Commission, qui a clairement indiqué au gouvernement Pedro Sánchez à plusieurs reprises que leur proposition n’était pas acceptable et qu’ils n’allaient pas fermer les yeux. Il y a eu des courriels, des conversations informelles, des réunions au niveau ministériel, des messages de la présidente Ursula von der Leyen à Pedro Sanchez. Une campagne claire qui a payé. Face à l’éventualité d’une procédure d’infraction, et aux comparaisons insupportables avec ce qui se passe en Hongrie ou en Pologne, la Moncloa a fait marche arrière. « Le CGOJ exerce ses fonctions à titre intérimaire depuis décembre 2018, aggravant les inquiétudes selon lesquelles il pourrait être perçu comme vulnérable à la politisation », déplore encore Bruxelles.

Le niveau d’indépendance judiciaire est perçu en Espagne comme très faible tant par le grand public que par les entreprises. « En général, 38 % de la population générale et 39 % des entreprises perçoivent que le niveau d’indépendance des tribunaux et des juges est « assez ou très bon » en 2021. Les deux chiffres ont diminué par rapport à 2020 ( 44 % pour le grand public et 42 % pour les entreprises), mais ils ont augmenté par rapport à 2016 (30 % pour le grand public et 33 %), sans montrer de tendance nette au cours des cinq dernières années », rappelle l’analyse.

Le rapport, qui intervient à un moment très délicat en Espagne, avec un affrontement ouvert entre l’exécutif et le judiciaire après la décision constitutionnelle de la semaine dernière sur la non-validité de l’état d’alarme pour des décisions telles que le confinement total, fait également explicitement référence à les enquêtes et les « pouvoirs de la Cour suprême pour engager des poursuites pénales des postes de haut niveau », ainsi que le « régime des incompatibilités des juges et procureurs ». « Des inquiétudes ont été réitérées quant à l’autonomie du parquet par rapport au gouvernement », peut-on lire également.

Pas une nouveauté non plus. La nomination, et surtout après que Sanchez a confié le poste à son ancienne ministre Dolores Delgado, ne plaît pas à Bruxelles. Il s’agit d’une question d’ensemble plutôt que de détails, car comme dans le cas de l’organe de contrôle des magistrats, il existe des pays, grands ou petits, ayant des pratiques identiques ou similaires. Mais le fait que cela arrive dans plus d’endroits ne veut pas dire que c’est bien vu. Et encore moins lorsque les sondages nationaux et européens indiquent qu’il existe dans notre pays une méfiance très importante à l’égard de la justice et de la séparation des pouvoirs en général et qu’il y a eu, au cours des dernières décennies, tant de cas de corruption et d’une telle et profil haut.

Après des dizaines d’entretiens et de consultations, la Commission européenne estime que bien que « les mesures anti-corruption suivent une ligne d’action stratégique », il n’y a pas de « stratégie anti-corruption spécifique en Espagne qui guide les mesures préventives et répressives pour lutter contre la corruption de manière globale En ce qui concerne la répression de la corruption, elle est classée comme un crime dans le Code pénal et il existe plusieurs institutions spécialisées, « mais le fisc » souligne que le manque de ressources adéquates affecte la rapidité d’instruction et de poursuite des affaires de corruption. , y compris les affaires de corruption de haut niveau… L’insuffisance des ressources reste un obstacle au traitement efficace des affaires de corruption de haut niveau, dont beaucoup sont pendantes en phase d’enquête depuis plusieurs années », dénonce le journal.

Il en va de même avec la loi Gag, critiquée depuis des années par ceux qui détiennent désormais le pouvoir. « En France et en Espagne, on s’inquiète de l’impact de la législation sur la sécurité publique sur le travail des organisations de la société civile, en relation avec la liberté d’expression et d’information et le droit de manifester », est-il indiqué.

Du côté positif, les techniciens communautaires signalent certaines améliorations au cours des derniers mois. « Diverses mesures ont été adoptées ou sont envisagées pour améliorer la qualité de la Justice, comme des révisions du système d’aide judiciaire et du Code pénal, ainsi que trois projets de loi sur l’efficacité procédurale, organisationnelle et numérique. Bruxelles salue l’engagement de l’Espagne en faveur de la numérisation, pour laquelle elle prévoit de consacrer des montants importants de fonds européens récemment approuvés. « La numérisation de la justice avance. Des efforts ont été faits pour pallier les retards, comme la création de nouveaux tribunaux, mais le faible nombre de juges par habitant est un défi. Le développement d’un outil pour tenter de retranscrire les audiences et les procès est applaudi. .

Il y a aussi des améliorations en matière de lutte contre la corruption, malgré le manque de moyens évoqué. « En cuanto a la prevencin de la corrupcin, Espaa contina mejorando su marco de integridad y se ha comprometido a desarrollar legislacin en reas clave como la transparencia de los lobbies, un Cdigo de tica para los funcionarios y la proteccin de los denunciantes », destaca le texte.